Al Jazeera (en arabe الجزيرة – parfois transcrit en français al-Jazira, al-Jezira ou al-Djezira), est une chaîne de télévision satellitaire qatarienne qui émet en arabe, en anglais, en turc et en serbo-croate. En 2008, la chaîne compte entre 35 millions et 40 millions de téléspectateurs quotidiens dans le monde.
La chaîne Al Jazeera, dont le nom signifie littéralement « la Péninsule », basée à Doha au Qatar, est lancée le 1er novembre 1996, par le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, émir du Qatar, qui vient d’arriver au pouvoir en renversant son père. Elle vise à rompre la mainmise des Saoudiens sur le paysage médiatique international arabe, à briser le contrôle des gouvernements arabes sur l’information nationale et donc à libéraliser le paysage médiatique arabe. Pour représenter au mieux son public arabe, Al Jazeera ne prend pas seulement des journalistes libanais mais des journalistes de tous les pays arabophones. Le noyau dur de l’équipe éditoriale d’Al Jazeera provient de BBC Arabic Television.
Depuis 1998, la chaîne émet 24 heures sur 24 et elle est diffusée dans 35 pays, principalement du Proche-Orient, mais aussi en Europe. En France, elle est diffusée dans les bouquets Numericable, Canalsat et l’offre de Free et de Neuf. Néanmoins, on peut recevoir Al Jazeera gratuitement puisqu’elle diffuse en clair sur les satellites Hot Bird et Astra. Au Royaume-Uni, elle emploie soixante journalistes et disposait, en 2001, d’un budget de 30 millions USD.
En 1998, elle montre ses propres images des bombardements américains sur l’Irak et s’oppose à l’interprétation minimisant les bombardements faite par les chaînes nationales arabes.
Lors de la seconde intifada « al-Aqsa » en 2000, les journalistes locaux d’Al Jazeera interviewent régulièrement les responsables du Hamas et du Jihad islamique, la chaîne montre des images en direct. Les discours du Fatah ne sont plus les seuls reçus par les téléspectateurs.
Le 7 octobre 2001, la chaîne diffuse un enregistrement vidéo d’Oussama ben Laden lors de l’intervention américaine contre les talibans en Afghanistan. Elle s’affirme sur la scène internationale pendant toute la durée du conflit car elle est la seule télévision internationale à disposer de correspondants en Afghanistan. Ses positions et ses reportages sont accusés d’être pro-talibans et anti-américains, et de focaliser, de par ses reportages, l’opinion publique des pays arabes contre les États-Unis. Les chaînes américaines avaient alors censuré ses images et même appelé les militaires à la considérer comme cible potentielle pour un bombardement. Le 3 octobre 2001, Colin Powell, secrétaire d’État américain, s’adresse à Hamad ben Khalifa al-Thani, émir du Qatar et principal actionnaire de la chaîne, lui demandant d’intervenir auprès de la direction afin de modifier sa couverture des événements.
En octobre 2001, le président égyptien Hosni Moubarak en visite dans ses modestes locaux aurait dit : « C’est donc de cette boîte d’allumettes que vient tout ce vacarme ».
Les locaux de la chaîne sont bombardés par les États-Unis à deux reprises : la première fois en Afghanistan et la seconde fois en Irak. Un journaliste, Tarik Ayyoub, est tué à Bagdad par le bombardement. The Daily Mirror annonce le 22 novembre 2005 à la une que le Président des États-Unis George W. Bush a voulu bombarder les locaux de la chaîne à Doha, mais le Premier ministre du Royaume-Uni Tony Blair l’en a dissuadé. Sami al-Haj, un journaliste-cameraman soudanais, est aussi victime de cette politique. Arrêté en décembre 2001 en Afghanistan et emprisonné à partir de juin 2002 à la prison de Guantanamo, il est libéré six ans plus tard en juillet 2008, sans qu’aucune charge ne soit portée contre lui.
Différentes opinions sur la chaîne
En Occident, Al Jazeera est considérée par ses détracteurs comme « la voix des islamistes », car elle offre une ligne éditoriale sur le monde musulman différente de celles des médias occidentaux. Il s’agit surtout d’une chaîne d’information internationale qui vise, comme CNN le fait pour l’Europe et les États-Unis, à laisser s’exprimer « toutes les sensibilités arabes ».
Mais la situation s’améliore et la chaîne de télévision est mieux perçue en Occident, désormais considérée comme légitime et même indispensable pour suivre les événements de la région.
En France, longtemps vue comme « la chaîne des parents » (c’est-à-dire des immigrés de première génération, arabophones), elle commence à se diffuser, sans doute depuis 2009 et le conflit à Gaza, auprès des jeunes générations qui pourtant, pour la majorité, ne comprennent pas l’arabe littéral.
Dans le monde arabe, Al Jazeera est diversement perçue : certains la considèrent comme pro-américaine et pro-sioniste, les gouvernements arabes lui reprochant de porter atteinte à leur contrôle total sur les médias, et les « néo-libéraux arabes » critiquent son populisme.
Depuis mai 2002, Bahreïn interdit aux journalistes d’Al Jazeera de travailler — la chaîne d’information n’a ainsi pas pu relater les premières élections nationales de Bahreïn où les femmes avaient le droit de vote et le droit de se présenter. Le gouvernement bahreïni estime qu’Al Jazeera chercherait « délibérément à nuire à Bahreïn » lorsqu’elle retransmet, sans autorisation gouvernementale, des manifestations anti-américaines ; le ministre de l’Information Nabil al-Hamr ajoute qu’Al Jazeera serait biaisée en faveur d’Israël et « infiltrée par les sionistes » — mais les autorités n’ont pas confirmé cette seconde accusation.
Le 23 décembre 2007, à la suite des attentats du 11 décembre 2007 à Alger, la chaîne pose la question suivante sur son site web : « Soutenez-vous les attentats d’Al-Qaïda en Algérie ? ». Ceci indigne la majorité des Algériens qui exigent des excuses de la chaîne.